Ce travail d’évaluation finale qui appréhende les quatre années de mise en œuvre du Programme national de médiation sanitaire (2013-2016), a été mené par le cabinet d’étude Novascopia avec le soutien pour la maîtrise d’ouvrage de G2C Conseil.
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« La dimension nationale du programme trouve tout son sens dans l’activation de relais à l’action voire dans les modifications de fonctionnement des structures mobilisées. Les regroupements entre médiateurs et les échanges de pratiques permettent à chacun de se nourrir des expériences des autres et d’envisager des leviers d’action sur son propre territoire.
La gestion des urgences médicales et l’orientation des personnes pour l’ouverture des droits préalables aux prises en charge médicales sont des tâches chronophages et prioritaires pour les médiateurs. Outre leur impact sur les personnes accompagnées, elles peuvent aussi occasionner une sensibilisation des interlocuteurs à la prise en compte des questions de santé. Cette démarche peut être renforcée par des interpellations rappelant les obligations légales adressées par les associations aux municipalités qui refusent la domiciliation des populations roms ou encore aux CPAM faisant des demandes de pièces abusives pour les dossiers d’ouverture de droit.
La salubrité des lieux de vie fait l’objet d’un recueil d’indicateurs par les médiateurs sur chacun des terrains ciblés par le PNMS. Cela fait débat car cela demande un temps d’observation (présence de poubelles, en nombre suffisant, périodicité du ramassage, présence de nuisibles, état du sol…) qu’ils ne peuvent pas nécessairement dégager. Par ailleurs, pour certains, il s’agit d’indicateurs qui ne sont pas des priorités associatives ou encore, qu’ils considèrent ne pas relever de la médiation sanitaire.
Si le plaidoyer intègre les aspects de salubrité des lieux de vie, on observe peu de retombées directes sur la situation des bidonvilles. Une réflexion est à mener avec les associations sur l’opportunité des modalités de collecte et de traitement des indicateurs de salubrité des lieux de vie.
Plusieurs moyens sont mis en œuvre par les associations pour améliorer la prise en compte institutionnelle des questions de santé et de salubrité sur les territoires. Cependant, la question de l’adéquation des moyens mis en œuvre au regard de l’ampleur des enjeux, de la multiplicité des acteurs concernés et des résistances institutionnelles rencontrées par les associations se pose. Quel est l’impact d’un rappel à la loi réalisé par une association à une municipalité ou à une CPAM ?
Sans impulsion politique nationale, il paraît difficile de générer des résultats à la hauteur des moyens investis. Bien que le programme national de médiation sanitaire soit financé par les services de l’Etat au niveau national, par des ARS au niveau local voire des collectivités, les associations doivent, pour mettre en œuvre le projet, faire face à des obstacles qui sont bien souvent liés au non-respect de la loi et aux résistances institutionnelles quant à la prise en charge des populations Gens du voyage ou habitants de bidonvilles. Une réflexion pourrait être engagée avec les membres du comité de pilotage afin d’envisager un dispositif d’accompagnement opérationnel du programme, institutionnel, à enclencher lorsque les difficultés rencontrées par les associations, comme dans le cas de la domiciliation, relèvent du non-respect du droit par les institutions.
La médiation sanitaire permet l’amélioration de l’accès aux soins et à la prévention des personnes en situation de précarité, particulièrement pour les publics allophones, à condition que le système de santé en direction duquel il fait médiation soit engagé dans l’accueil et la prise en charge de ces derniers.
Finalement, cette conception de la médiation renvoie à ce que l’on appelle l’accessibilité universelle. Cette notion plutôt réservée aux acteurs du handicap peut parfaitement se développer dans le champ de la promotion de la santé et de la santé publique. Permettant aux personnes de développer des connaissances et des compétences sur la maladie, les traitements, leur suivi dans un parcours de soin, la médiation leur permet, si elles le souhaitent, d’acquérir de l’autonomie pour ouvrir des droits, comprendre les symptômes d’une pathologie, savoir localiser le service de santé adapté à la situation ou encore appréhender progressivement les déterminants de la santé en lien avec un mode de vie cependant difficile.
Pour la première fois en France, la loi de modernisation de notre système de santé promulguée le 27 janvier 2016 comprend un article (art.90) qui traite de la médiation sanitaire :
- – Le chapitre préliminaire du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est complété par un article L. 1110-13 ainsi rédigé :
« Art. L. 1110-13. – La médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique visent à améliorer l’accès aux droits, à la prévention et aux soins des personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins, en prenant en compte leurs spécificités.
« Des référentiels de compétences, de formation et de bonnes pratiques définissent et encadrent les modalités d’intervention des acteurs qui mettent en œuvre ou participent à des dispositifs de médiation sanitaire ou d’interprétariat linguistique ainsi que la place de ces acteurs dans le parcours de soins des personnes concernées. Ces référentiels définissent également le cadre dans lequel les personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins peuvent avoir accès à des dispositifs de médiation sanitaire et d’interprétariat linguistique. Ils sont élaborés par la Haute Autorité de santé. ».
Le choix de l’extension du programme aux publics des Gens du voyage en situation de précarité est le résultat de nombreux échanges entre l’AŠAV, la FNASAT, le collectif Romeurope et la Direction Générale de la Santé. Après trois années de fonctionnement, de multiples documents méthodologiques en précisent le contenu opérationnel et les outils. Les critères de qualité ne sont pas encore déterminés à ce stade.
Avant de s’attacher à imaginer les contours d’un système sanitaire et social qui puisse favoriser le développement de la médiation sanitaire, il est tout d’abord indispensable de saluer le travail, l’énergie, la rigueur professionnelle que dégagent l’ensemble des acteurs de la médiation sanitaire à toutes les échelles du programme : coordinations nationale et locales, médiateurs-trices sanitaires sur les lieux de vie au plus près des populations. Si des points d’amélioration sont identifiés dans le pilotage et la coordination du programme ou encore dans les conditions de transférabilité aux Gens du voyage, il faut saluer les efforts conséquents réalisés par les équipes de médiation pour harmoniser les pratiques, faire connaître le programme aux acteurs locaux et inventer de nouveaux outils adaptés aux besoins des populations.«
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